La Bolduc

Par Gaëtane Therrien

Premier gros plan : la fille aînée de Mary Travers, enceinte, lisant une lettre de sa mère devant une fenêtre, clin d’œil à une toile de Vermeer, peintre hollandais du 17e siècle. On verra par la suite les relations tendues entre elles.

Liseuse à la fenêtre de Johannes Vermeer

Le film nous plonge dans l’époque de l’entre-deux-guerres des années trente où la misère humaine, la domination du clergé, les familles nombreuses, enfin, où la période de la Grande Noirceur régnait. Nous sommes donc bien campés pour comprendre d’où émerge la mythique Bolduc.

De descendance irlandaise, elle connaissait déjà l’esprit des airs folkloriques irlandais. Ce qui la démarquera, c’est qu’elle finira par écrire ses propres chansons et les interpréter avec un aplomb et un plaisir réel d’être sur scène.

Après treize grossesses, dont neuf fausses couches et enfants décédés, son mari ayant perdu son emploi à la suite d’un accident de travail, elle songe petit à petit à chanter. Quasi indigente, avec un talent certain, elle commence à avoir confiance en elle et, fortement encouragée par une amie, commence à chanter.

Debbie Lynch-White incarne à merveille la Bolduc : elle s’investit totalement dans son personnage. Sa présence transcende l’écran. C’est ici que se cristallise le mythe. Partie de rien, du petit peuple, parfois mourant de faim, avec sa turlute incontournable, ses paroles et ses mélodies (de vrais petits bijoux), sa détermination qui ne se dément jamais, et un courage fou, elle défonce les barrières sociales sans le savoir. Elle enregistrera au fur et à mesure ses chansons. Et surtout, elle entreprendra de longues tournées à travers le Québec qui la propulseront au sommet de son art. Le petit peuple l’aime, car il se retrouve en elle.

Certaines scènes m’ont profondément touchée. Celle où, dans son contrat, seul son mari pouvait signer et recevoir les sous, la femme étant légalement « mineure ». Cependant, elle parviendra finalement à gérer ses propres revenus. Celle aussi du début avec le curé lui faisant la morale, mais bien heureux de recevoir une partie des recettes. Celle seule avec ses enfants, son mari parti à la taverne noyer son orgueil blessé d’homme meurtri de n’avoir pu nourrir sa famille et faisant face à une femme trop forte pour lui. Celle aussi avec ses enfants au cimetière devant six croix blanches. Et bien d’autres.

Un petit bémol : j’aurais souhaité entendre plus d’airs de la Bolduc. C’est un film louable, touchant, reflétant bien l’époque, de belle facture, rendant bien justice à la grande Bolduc. Film absolument à voir. Merci au Cinéma du lac pour votre choix de films d’auteur.

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