Par Dyane Raymond et Charlie McKenzie
« Sous les pavés, la plage », clamait la révolte de mai 68 à Paris. Pour la jeunesse de ces années-là, c’était le temps des idéaux, des révolutions, des fleurs au fusil, de l’amour et d’un pays… libres. C’était l’époque où on coupait les ponts avec les idées conformistes de nos parents pour partir sur les routes de la grande aventure. L’époque où nous faisions nos propres apprentissages, comme eux avant nous, et comme ceux qui sont venus et viendront après nous.
J’aurais aimé vouvoyer ma mère, lui offrir encore plus de respect, d’attention, de tendresse. Au lieu de cela, je l’ai bousculée, provoquée, aimée, à ma manière. Qui était celle de l’enfant rebelle, indépendante, excessive que j’étais ; et que je suis sans doute restée. Elle, elle n’a jamais lâché prise, n’a jamais failli à son rôle. Avec opiniâtreté, insistance ; avec une conviction inébranlable. J’ai continué à être sa princesse, son trésor, son amour. Jusqu’à son dernier souffle. Qu’elle m’a offert comme un ultime trésor. Avec une douceur inimaginable. Main dans la main. Et elle m’a laissée sur le seuil. Comme l’adolescente déterminée qu’elle a laissée quitter la maison. Comme l’aventurière à peine majeure qu’elle a laissée explorer le monde. Comme l’échappée belle qu’elle a laissée s’expatrier. Comme l’amoureuse qui prit mari, prit pays qu’elle a laissée vivre loin d’elle. Elle m’a laissée devenir celle que je suis. Une femme imparfaite, excentrique. Elle n’a pas retenu mes élans, même si elle ne les comprenait pas toujours. Elle a encouragé mes efforts, vanté mes bons coups, applaudi mes réussites, pleuré mes peines. Comme la plupart des mamans, direz-vous. Ben oui, c’était une vraie maman. Maman Carmen.
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