Lectrices et lecteurs du Cantonnier qui, depuis le temps, me faites le plaisir et l’honneur de supporter mes « humeurs », vous savez que l’objectivité n’est pas ma principale qualité de chroniqueuse, mais que regarder l’Autre, apprécier la beauté de la vie, la bonté de la nature, aimer, contempler, marcher dans le bois, nager dans le petit lac, etc. forgent mes valeurs et alimentent ma joie.
Ainsi, j’ai commencé à lire le récit de Geneviève Perron avec, je le reconnais, un préjugé favorable, puisqu’elle est une amie habitant le village voisin de Sainte-Hélène-de-Chester. Toutefois, étant d’abord une lectrice, je ne cherchais pas tant à mieux connaître une amie qu’à découvrir un texte. Que j’ai trouvé.
Celui, d’une part, d’un voyage étonnant, un périple de deux mois qui l’a menée au Népal en trekking dans l’Annapurna. Juste ça : imaginez ce que ça demande d’audace et de courage. Doublés d’une longue préparation et d’une excellente forme physique, il va sans dire, et davantage encore de détermination et de dépassement. Chacun d’entre nous s’efforce d’atteindre des sommets à sa mesure, de franchir des limites pour traverser une imperceptible frontière menant à une grâce au-delà du réel. Pas besoin pour ça de se hisser au sommet de l’Himalaya. Mais Geneviève Perron y est allée, elle, et en la lisant j’avais des frissons ; il faisait froid là-haut, certes, et les dangers étaient vrais et multiples. C’est l’émotion cependant, à la hauteur du sublime des paysages, des efforts, de la volonté qu’il faut pour se rendre jusque-là qui m’a atteinte. À travers laquelle s’est révélé un simple amour d’autrui, sans condescendance ni jugement, qui comme tout être vivant mérite attention. Mais où cet autre peut être aussi quelqu’un qui déçoit ou exaspère ; c’est pas parce qu’on est à l’autre bout de la Terre que la réalité de la nature humaine change tant que ça. Il n’en reste pas moins que ce récit, écrit avec sincérité et d’une qualité exemplaire, est héroïque. De cet héroïsme à la fois plus petit et plus grand que soi, plus fort et plus faible que ce qu’on imaginait. Geneviève Perron a gravi jour après jour cette montagne et l’a offert en partage.
D’autre part, parallèlement au récit de voyage, en est un autre confié avec bravoure, d’une maladie aveugle et implacable. Qui demande au moins autant de détermination et de dépassement pour l’accepter et la surmonter. Elle l’a aussi traversé, ce désert de glace et de solitude, aux écueils bien plus douloureux que le froid et l’épuisement. Elle en parle sans pathos et sans détour. Elle en parle bien.
Pourquoi j’ai aimé son livre ? Parce qu’on en sort grandi.
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