L’Humeur buissonnière

« Arborientation », œuvre in situ pour 16 musiciens de Scott Thompson, Bouleau à papier et Lori Freedman à la clarinette (Par Dyane Raymond)

Vous me connaissez, j’aime marcher, dans le bois, dans le silence, dans la solitude, avec précaution, avec attention, avec lenteur. Et puis, tout autrement, parfois je file à longues enjambées sur la grand-route, arrive au village, me prends les pieds devant chez Ginette et Aldéi et on jase de tout et de rien, surtout de tout. Ce qu’on vit, ce qu’on pense, ce qui se passe ou pas, de notre santé et de celle des autres. On prend des nouvelles.

Lors de mes marches en forêt, avais-je déjà attribué ou associé un arbre à une personne et/ou à une musique ? Je ne crois pas, non. Le tilleul devant la maison, à notre regretté collaborateur Gilles Dufresne, oui ; un grand ciel bleu parsemé de fins fils blancs à madame Lehoux aussi ; et à Lise, la maman de Joane, le ruisseau qui traverse le 7. Mais à des vivants en action, pas encore.

Le musicien tromboniste Scott Thompson l’a fait, lui. Bien bellement. C’était en ville, dans un des plus vaste et enchanteur jardin de la métropole. Il y avait du monde, des murmures et des mouvements. Des empreintes sonores qui voyageaient d’un arbre à l’autre, d’un corps à l’autre, d’un instrument à l’autre. Et nous marchions, suivant ou pas un tracé proposé, nous arrêtant ou pas pour écouter la musique, saluer une connaissance, toucher l’écorce du bouleau à papier, du frêne rouge, du thuya occidental, du caryer ovale, etc. ; frôler seulement la corolle de la fleur ; laisser l’herbe ou la fourmi nous chatouiller le mollet.

Ce ne fut pas facile de se sortir de là, de changer d’air, de briser le rythme. De retrouver le bruit et la fureur.

Encore et toujours, chaque fois que je pars de la ville et que j’arrive en campagne, je mesure la chance que j’ai, le privilège oserais-je dire, de pouvoir ouvrir les yeux le matin sur la fluorescence de l’horizon, de les fermer sur un scintillement infini, de me remplir la tête de bruissements et de silences. Je sais, c’est un peu lyrique et romantique mon affaire, c’est là mon moindre défaut, j’assume.

En fait, Aldéi l’exprime mieux que moi, plus simplement et naturellement : « On est bien ici, non ? »

Bon été, belles vacances.

Dyane Raymond
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