Chronique historique: La venue de familles arméniennes à Disraeli au cours du XXe siècle

Chronique historique DisraeliLe 25 avril dernier, partout à travers le monde, on a fait la commémoration du centième anniversaire du génocide arménien au cours duquel, plus de 1.5 million de personnes furent exécutées ou déportées par les autorités militaires de l’Empire Ottoman. Ce fut le premier grand génocide du XXe siècle mais malheureusement pas le dernier.

Dès 1900, on assiste à un exode massif de familles d’Arménie et d’Anatolie. Ils fuient l’Asie Mineure où la vie est devenue très pénible pour cette population d’obédience chrétienne (entre 1894 et 1896, 200,000 Arméniens ont été massacrés) et se dirigent vers l’Europe puis l’Amérique. Plusieurs de ces exilés, en quête d’un milieu de vie plus favorable, se sont retrouvés à Disraeli. Ce sont les premiers immigrants venus se joindre à notre collectivité.

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M. Aziz Setlakwe (1873-1933)

S’il faut en croire M. Raymond Setlakwe, il semblerait « qu’Aziz Sarafian (dit Setlakwe)* ait été le premier arménien à immigrer dans la province de Québec et, il a décidé d’aller vivre à Disraeli (avec son épouse Mary Barakat et ses deux fils Michel et Calid, âgés de quatre et cinq ans). Pourquoi avoir choisi Disraeli? Parce qu’il savait qu’un syrien de Mardin du nom de Jarjour y était déjà établi » (3). En 1904, M. Aziz Setlakwe ouvre un magasin de vêtements sur l’actuelle rue Champlain. Trois ans plus tard, en 1907, la famille quitte Disraeli pour aller vivre à Thetford-Mines. Le magasin passe à Jacob Anto et Arochane Malaki, son épouse. M. Anto va s’associer à son beau-frère Albert Zako et tenir commerce jusqu’ à la fin des années 1950. La maison Setlakwe va, par la suite, reprendre la succession. La bâtisse sera vendue et déménagée sur la rue Champoux. Un nouveau magasin va apparaître sur le site de l’ancien.

Tribune 1951 Anto Zako
Magasin Anto et Zako de Disraeli. La bâtisse a été déménagée sur la rue Champoux. Elle est actuellement la propriété de M. Roger Grondin.

Au début du XXe siècle, M. John Elkas et Catherine Jarjour son épouse, ouvrent une mercerie sur la rue Champoux. Leur magasin sera détruit par l’incendie du 26 novembre 1911 qui a réduit en cendre seize immeubles du secteur. M. Elkas reconstruira sa mercerie en 1912 au coin des rues Champoux, Saint-Antoine et Laurier, sur l’emplacement de l’actuelle Banque Nationale. Vingt ans plus tard, l’établissement sera à nouveau la proie des flammes. M. Elkas va quitter Disraeli pour Sherbrooke.

Vers 1900, M.Gabriel Jourhorgi, marchand ambulant et Zalica Audette son épouse s’installent à Disraeli pour quelques années. Au début de 1940, les frères Louis Batrie (époux d’ Afifz Komerey), restaurateur et Aziz Batrie (époux de Zakia Salms) industriel s’installent chez-nous. M. Aziz Batrie va ouvrir une manufacture de lattes à proximité des Chutes Champoux et élever sa famille chez-nous. M Joseph James Nash a vécu les dernières années de sa vie à Disraeli. Il est décédé en 1969.

M. Salim Karsh, natif de Syrie et son épouse Thérèse Cloutier viennent s’installer chez-nous vers 1960. M. Karsh va occuper le poste de gérant du magasin Setlakwe de Disraeli pendant plusieurs années. Il a également été l’un des fondateurs de la jeune Chambre de Commerce locale. M. Karsh était le frère du photographe de réputation mondiale Yousuf Karsh. Il est décédé à Sainte- Marie-de-Beauce, le 9 octobre 2012, à l’âge de 87 ans.

D’autres familles arméniennes et syriennes ont choisi de s’établir ailleurs en région; entre autres à Saint-Joseph-de-Coleraine, Thetford-Mines et en Beauce.

(*) Le mot Setlakwe signifie « six frères » en langue arabe (Setla Khoué). Cinq ont été exécutés par l’armée turque lors des premiers massacres de 1894-96. Aziz a fui et s’est retrouvé à Disraeli en 1904.

Ref :(1) Centre des archives de la région de Thetford.
(2) Journal La Tribune de Sherbrooke, 31 mars 1951.
(3) Journal la Presse de Montréal, 24 avril 2015.

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