L’Humeur buissonnière

Texte d’introduction par Lise Morency, Thetford Mines :
Photo d’une petite fille prise en 1933, elle a 18 mois, elle est née en 1932.
Cadette choyée d’une grande fratrie de 11 frères et sœurs.
2022, seule survivante de cette grande famille et maman de deux enfants.
2022, maintenant en CHSLD, elle tenait fermement à avoir cette photo tout près de son lit pour rappeler au personnel aidant que son corps, maintenant vieux et souffrant, avait été jeune lui aussi, et qu’elle souhaitait qu’on en prenne autant soin qu’à son jeune âge… Photo par Lise Morency

Elle commence comme ça, cette Humeur, qui change comme de chemise puisqu’elle est buissonnière. Et les vacances étant souvent un terrain fertile pour l’imagination et les idées nouvelles, au détour d’une marche sur le rang 7 (était-ce celle où Aldéi m’a vue passer sous une pluie torrentielle ? — clin d’œil), j’ai ébauché ceci : m’inspirer d’une image et d’une pensée de l’Autre — celle ou celui à qui je m’adresse ici — pour que cette Humeur soit encore davantage un partage.

Alors j’en ai parlé comme ça aux amis après le souper, et Lise savait déjà ce qu’elle voulait me proposer. Son histoire est la nôtre, c’est vrai ; son histoire est Historique, pas universelle, pas générale, mais particulière et unique, comme l’est une vie.

Cela dit.

C’est quand même un drôle de hasard, ai-je réagi en recevant la photo et son texte, alors que je venais tout juste de terminer le roman d’une Islandaise, La vérité sur la lumière, d’Auður Ava Ólafsdóttir. L’histoire très belle d’une lignée de sages-femmes où il est question de la vie, comme de raison, et de la mort qui la conclut, deux néants d’un même commencement, celui d’un avant et celui d’un après. Un roman simple et déroutant, marqué de moments de saisissantes beautés, comme lorsqu’on s’accorde le privilège de la contemplation.

« On dit que l’homme ne se remet jamais d’être né. Que l’expérience la plus difficile de la vie, c’est de venir au monde. Et le plus difficile ensuite, c’est de s’habituer à la lumière. » Et ailleurs encore : « Je repense aux paroles de ma grand-tante, debout à la fenêtre, son café à la main, l’homme vient au monde nu comme un ver et cherche un sens à son existence. Je repose le livre sur ma table de chevet, je tire sur le fil de la lampe et j’éteins. Les franges de perles de l’abat-jour tremblotent.

Nuit, je t’attends.

Puis que revienne la lumière. »

Dyane Raymond
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