Immigration : La réalité d’ICI

Il est de plus en plus question d’immigration, ici comme ailleurs. Au-delà des nouvelles internationales et de la situation provinciale, qu’en est-il ici, chez nous, dans la région ? Comment ça se passe, l’accueil et l’intégration des immigrants ?

Selon les années, ce sont de 15 à 60 personnes et leurs familles qui viennent s’établir dans la MRC des Appalaches, nous révèle Mme Eva Lopez, directrice générale de l’organisme Intégration communautaire des immigrants (ICI). Les choses ont beaucoup changé depuis l’arrivée de Mme Lopez en 1993. À cette époque, les immigrants devaient se rendre à Sherbrooke pour avoir un cours de français.

Mme Eva Lopez au cœur du kiosque qu’elle utilise lors des présentations.

Un parcours à défricher
Originaire de la Colombie, fille unique, Mme Eva Lopez est arrivée au Québec avec son fils aîné en 1993. Sa mère est venue les rejoindre trois ans plus tard. La raison pour laquelle elle est venue vivre au Québec, c’est… l’amour ! « Qui prend mari prend pays », nous dit celle qui a marié un Québécois « pure laine ». Ce qu’elle a trouvé le plus difficile au début, c’est de ne pas pouvoir parler français et… son premier hiver !

Pour s’intégrer, madame Lopez s’est impliquée socialement en faisant du bénévolat à l’école de ses enfants où elle a donné des cours d’espagnol et de bricolage aux élèves. Elle donnait beaucoup de son temps aux communautés culturelles et aux organismes communautaires. Un jour, elle a reçu l’appel d’une personne immigrante qui était en difficulté et qui avait besoin d’une aide urgente. C’est à partir de ce moment qu’elle a entrepris d’aider les immigrants à sortir de leur isolement à travers la francisation, l’emploi et l’inclusion sociale. Elle est rapidement devenue une référence dans la région.

Durant les premières années, elle s’implique bénévolement avec le soutien financier et moral de son mari. Avec des demandes toujours grandissantes et ne pouvant plus fournir à elle seule, elle décide en 2003 de mettre sur pied l’organisme « Intégration communautaire des Immigrants (ICI) ». En travaillant en étroite collaboration avec le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion (MIDI), l’organisme obtient en 2004 ses premières subventions permettant les cours de francisation, l’embauche d’une secrétaire et d’une conseillère en emploi pour le service aux entreprises.

Depuis ce temps, « la belle aventure se poursuit », dit-elle. En 2018, ICI a célébré son 15e anniversaire et organisé un gala « reconnaissance » pour souligner l’entrepreneuriat immigrant et les histoires à succès des femmes et des hommes originaires des quatre coins de la planète, qui ont choisi la région pour réaliser leurs projets de vie. Des histoires à succès qui se comptent par centaines dans la région.

Des services essentiels
Son équipe compte aujourd’hui quatre ressources qui parlent plusieurs langues. À ce jour, ICI a dispensé le service de francisation à plus de 200 personnes. Mais l’organisme offre davantage que la francisation. Mme Lopez donne entre autres de l’information sur la région, notamment lors de séances de régionalisation à Montréal. Elle s’assure de l’accueil des personnes à l’aéroport et de leur transport, du soutien à l’installation par l’aide à la recherche de logement, veille à l’inscription à la garderie ou à l’école, à l’ouverture d’un compte bancaire, et favorise l’intégration socioprofessionnelle en collaborant avec les employeurs.

De plus, des suivis sont assurés pour mieux accompagner les familles régionalisées. L’organisme offre aussi un logement temporaire, d’une semaine à dix jours, le temps de faire les démarches administratives pour ceux qui arrivent directement de leurs pays ou d’une à deux nuits pour les gens en provenance de Montréal, le temps de passer une entrevue d’emploi. Depuis trois ans, la MRC fournit l’aide financière permettant l’hébergement temporaire.

Mme Lopez précise qu’elle est très sélective. Elle veut s’assurer que les gens qui décident de vivre un nouvel enracinement soient bien préparés et réceptifs aux changements, qu’ils aient la capacité de s’adapter et qu’ils puissent « gagner leur vie » en répondant à leurs propres attentes et aux besoins du milieu. La sélection, « on la fait de façon responsable et avec une vision axée sur la durabilité », dit-elle. Le but est que la régionalisation devienne un projet de vie, basé sur la connaissance du milieu de vie régional, dans l’optique d’un apport pour tous.

L’adaptation
La francisation devient le noyau du partage et de l’adaptation. Le français, c’est ce qui les réunit tous dans leur effort d’adaptation, étant d’origines et de langues diverses. La francisation se fait à raison de quatre jours par semaine (du lundi au jeudi), trois heures par jour (9 h à 12 h). L’enseignant est embauché par ICI, mais approuvé préalablement par le MIDI. La difficulté fondamentale de l’intégration réside dans la fusion des cultures. Il y a des deuils à faire. Mais, en même temps, il y a des découvertes et l’espoir d’une vie meilleure.

L’attitude de la personne immigrante est déterminante pour faciliter l’intégration. « C’est beaucoup une question d’ouverture. Il s’agit d’accueillir l’autre pour que l’autre nous accueille. L’immigration, c’est une leçon d’humilité », dit Mme Lopez.

C’est la même chose pour nous qui accueillons ces personnes. Il nous faut nous ouvrir à l’autre. À ce sujet, elle dit que, « de façon générale, on constate que les gens dans la région sont courtois et respectueux. Le racisme est une exception. »

Je lui ai demandé ce qui pourrait être amélioré pour faciliter l’intégration des immigrants dans la région. En tête de liste, il y a l’adaptation de la formation professionnelle pour que les personnes puissent subvenir à leurs besoins par un emploi à la hauteur de leurs compétences, le plus rapidement possible.

Et dans le futur ?
« On crée un nouveau monde », affirme Mme Lopez. « Oui, on a le droit d’avoir des craintes. Mais oui, on a le devoir d’affronter ces craintes, de s’informer, de découvrir l’autre et soi-même en l’autre. »

L’occasion nous est donnée depuis 15 ans de découvrir les nouveaux arrivants de la région lors de la Fête nationale de la Saint-Jean puisqu’il y a un kiosque de dégustations aux saveurs du monde, à l’aréna de Black Lake. Alors, bon appétit et bonnes découvertes humaines « dans la réciprocité de l’amitié ».

Merci, Mme Lopez, pour cette généreuse rencontre.

À propos Jacques Beaudet

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